Reportage sur les meurtres de Jack l’éventreur dans Le Figaro, septembre – décembre 1888

Contexte

Jack l’éventreur était un tueur en série qui a assassiné plusieurs femmes dans le district Londonien pauvre de Whitechapel en 1888. On ne connaît pas avec certitude le nombre de victimes, mais il existe cinq victimes définitives, appelées les “cinq canoniques,” que Jack a tuées entre août et novembre 1888. 

Le premier meurtre, celui de Mary Ann Nichols le 31 août, n’a pas reçu beaucoup d’attention par la presse française, mais les quatre suivants recevaient de couverture considérable. J’ai décidé de me concentrer sur la couverture dans Le Figaro, parce que j’ai trouvé que ce journal offrait la couverture la plus détaillée et la plus fréquente de ces meurtres de tous les journaux français. J’ai choisi les articles de septembre à décembre, parce que le Figaro n’a commencé à parler des meurtres qu’à partir du meurtre d’Annie Chapman, le 8 septembre. Les meurtres suivants, ceux d’Elisabeth Stride et de Catherine Eddowes, étaient tous deux le 30 septembre. Le dernier meurtre canonique et le plus brutal, celui de Mary Jane Kelly, s’est passé le vendredi 9 novembre. En décembre, il n’y a plus de nouveaux meurtres, et Le Figaro a cessé de rapporter l’enquête.

Dans ce projet, j’expliquerai chaque meurtre, comment les journaux ont décrit ces actes de violence, les théories sur les suspects et les motivations, les opinions du public sur la police anglaise, et la manière dont la prostitution et le district de Whitechapel ont été décrits.

Meurtre d’Annie Chapman

9 septembre 1888

La première mention des meurtres de Whitechapel dans le Figaro est le 9 septembre. L’auteur rapporte dans un petit paragraphe qu’on pense que l’assassin est aussi responsable pour des autres meurtres commis plus tôt cette année. 

10 septembre 1888

Le jour suivant, on trouve un rapport plus détaillé avec une description de la scène du crime. Selon le rapport, “le corps de la victime a été littéralement ouvert de bas en haut. Une partie des entrailles était enroulée autour du cou.” L’auteur présente une première théorie de ce qui serait beaucoup. Les inspecteurs ont trouvé un tablier de cuir et un couteau près du lieu, alors la police soupçonne un mystérieux homme qui porte un tablier de cuir. Les citoyens croient que cet homme est juif. Enfin, les propriétaires de la maison où le corps a été laissé font payer l’accès à la scène de crime, et de nombreuses personnes sont venues pour la voir.

12 septembre 1888

L’auteur rapporte que des meurtres de cette nature se passent régulièrement dans le district de Whitechapel, et c’est la quatrième meurtre non résolu depuis avril. On critique le manque de compétence des inspecteurs anglais. Les victimes des ces crimes sont Emma Smith (tuée en avril), Martha Tabram (tuée trois semaines auparavant), Ann Nichols (tuée huit jours auparavant) et Annie Chapman (tuée le samedi précédent). 

L’auteur exprime la misogynie flagrante. Toutes ces femmes avaient “la même profession inavouable.” En plus, il dit, “sauf la première, les autres étaient âgées de quarante à quarante-cinq ans, point belles, sales à faire peur, leurs offres ne pouvaient donc tenter que des ivrognes formant du reste leur unique clientèle.” L’auteur insulte aussi Whitechapel parce que c’est pauvre, il sent mauvais, et il abrite les “misérables.”

La police a arrêté 10 hommes au hasard, et la colère envers les juifs de Whitechapel augmente. De nombreux juifs vivent dans ce district et le public continue de soupçonner que le meurtrier est juif.

19 septembre 1888

Selon cet article, la police a affirmé à plusieurs reprises d’avoir trouvé le coupable, mais chaque fois il s’est avéré qu’il est innocent. Tout le monde a abandonné la rumeur du tablier de cuir. Les “rodeuses de nuit” – les prostituées – portent des grands couteaux quand elles sortent maintenant.

26 septembre 1888

La police n’a toujours pas trouvé le coupable. Un médecin demande que la police enquête sur “tous les pensionnaires de maisons de fous mis récemment,” parce qu’il soupçonne qu’un fou est responsable pour ces crimes.

Meurtres d’Elisabeth Stride et Catherine Eddowes

2 octobre 1888

Selon l’auteur, Whitechapel est un “ghetto où se refuge en majeure partie de la lie de la population londonienne.” C’est une description très désobligeante et sans rapport avec le sujet de l’article. 

Il y a eu deux nouveaux meurtres qui se sont passés dans Whitechapel samedi soir dernier. Le première victime est découverte par un homme en calèche, qui a vu le cadavre et a trouvé la police. Quand la police est arrivée, le corps était encore chaud, que a signifié que la meurtre a été commis très récemment. La victime avait “des coupures à la tempe et à la joue gauches, qui étaient couvertes de boue,” mais, contrairement aux victimes précédentes, elle n’a pas été éventrée. Cette femme, Elisabeth Stride, était “une fille publique” qui “était toujours ivre.”

Une heure plus tard, la police a trouvé une autre femme morte dans la rue, le corps encore chaud. L’auteur écrit, “La gorge était coupée à moitié et la tête, presque détachée, était penchée, laissant voir la carotide tranchée d’un seul coup. Comme dans les meurtres de Whitechapel le cadavre avait subi les mêmes mutilations. Le ventre était ouvert; les intestins arrachés avaient été placés autour du cou.”

Étonnamment, à cette heure matinale, les gens se rendaient au marché, mais personne n’a rien entendu. Les inspecteurs soupçonnent que l’attaque a été rapide et que l’agresseur a coupé “le larynx et le carotide afin d’empêcher tout cri.” Les inspecteurs ont aussi une théorie sur la raison pour laquelle l’assassine n’a pas coupé le ventre de la première victime. Ils croient que l’homme en calèche est arrivé à la scène avant que l’assassin n’ait terminé son travail, et le bruit du calèche “l’a empêché de mutiler Elisabeth Stride.” Mais pour la deuxième victime, “il a eu le temps d’accomplir son œuvre infâme.”

3 octobre 1888

Il y a de nouveaux détails sur l’assassin, mais d’abord l’écrivain insulte les victimes et le district où elles habitaient. Il écrit, “les victimes sont toujours des femmes, misérables créatures de la plus basse classe.” Ces victimes dorment dans les hôtelleries pas chers, où on trouve “toute une population de mendiants, de marchands ambulants, de vieilles et horribles prostituées, de voleurs et de voleuses vit là, sans grand souci de la police, qui connaît parfaitement les métiers divers pratiqués parles hộtes de ces puantes demeures.”

Le jeudi passé, dit le journaliste, L’Agence du Central News a reçu une lettre par quelqu’un qui prétend être l’assassin. Dans la lettre, écrit à l’encre rouge, l’auteur se moque de la police parce qu’elle ne l’a pas encore arrêté. Il menace de continuer à assassiner des femmes. L’auteur dit, “dans mon œuvre prochaine, je couperai les oreilles de la dame et je les enverrai aux officiers de police, ça sera une bonne farce.” Il faut noter que pour le meurtre de Catherine Eddowes, commis quelques jours après que l’Agence du Central News a reçu cette lettre, l’assassin lui a coupé les oreilles.

L’auteur de la lettre souhaite bonne chance à la police, et il signe la lettre “Jack the Riper.” À partir de ce moment, la presse française appelle le meurtrier Jack l’éventreur.

Le journaliste ajoute un autre détail. Dans cinq des six meurtres récents à Whitechapel, le tueur a enlevé l’utérus de la femme. Ce détail est important parce que ça signifie que l’assassin connaît l’anatomie humaine. Un médecin anglais soupçonne un homme américain parce que cet homme lui a un jour demandé un utérus.

4 octobre 1888

Les rues de Whitechapel sont devenues vacantes la nuit. La police continue d’arrêter des hommes au hasard, mais elle n’a pas trouvé le coupable. Les gens ont fait plusieurs recommandations folles à la police, par exemple, ils conseillent aux policiers de se déguiser en femmes pour que le tueur les approche. Le lord-maire a offert une récompense de 12,500 francs pour des informations sur le tueur. D’après l’auteur, l’enquête “ne s’est pas assez occupé[e] dès l’origine.”

7 octobre 1888

Le nouveau suspect est un Malais, qu’un marin a rencontré dans un café en août. Le marin dit que cet homme a exprimé qu’il voulait tuer des prostituées.

17 octobre 1888

Les Anglais croient maintenant que le coupable est allemand, simplement parce que l’Angleterre a des relations tendues avec l’Allemagne. La police attend un autre meurtre pour trouver Jack l’éventreur.

24 octobre 1888

Les inspecteurs ont trouvé la femme qui avait envoyé des lettres à la police se faisant passer pour Jack. C’étaient toutes des farces. Récemment, quelqu’un a envoyé une moitié de rognon au président du comité de vigilance avec la note “prends-moi, si tu peux.” Selon le journaliste, il faut douter que c’était envoyé par Jack.

De plus, la police a pris un mois pour décider de visiter une à une toutes les maisons de Whitechapel, et elle a donné un préavis de 15 jours à tous les résidents, donnant à Jack beaucoup de temps de se cacher.

Meurtre de Mary Jane Kelly

10 novembre 1888

Dans un bref paragraphe, l’auteur écrit qu’une femme a été trouvée assassinée dans une maison du district de Spitalfields, à côté de Whitechapel. Elle s’appelait Mary Jane.

12 novembre 1888

L’auteur donne plus de détails sur le récent meurtre à Londres. Jack a encore tué, cet fois dans une maison “située dans une cour où grouille une immonde population qu’il va travailler,” où “il va s’acharner sur le cadavre d’une malheureux jeune femme, à ce point de le rendre inconnaissable.”

Le journaliste visite Whitechapel en compagnie d’un pickpocket local qui lui sert de guide. Le guide parle fort de l’incompétence de la police. Tous les deux vont voir la maison où Mary Jane Kelly habitait.

Quand la police est arrivée chez-elle, “Jane Mary Kelly était étendue toute nue sur son lit; la tête était séparée du tronc, le nez, les oreilles avaient été coupés, les seins arrachés, le foie, les entrailles étaient déposés sur la table, les jambes, les bras étaient tailladés à coups de couteau; la bête féroce avait assouvi sa rage sans avoir été dérangée, sans que l’on ait entendu le moindre bruit.”

Les inspecteurs ne sont pas sûrs quand elle a été tuée, mais quelqu’un a parlé à Kelly vers 8 heures et le corps était froid quand les inspecteurs l’ont trouvé à 11h30. Donc, c’est possible que Jack l’a tué entre 9 et 10 heures du matin. Le guide est certain que Jack n’est pas un local.

Les gens sont très en colère contre Charles Warren, le chef de la police, parce que la police n’a pas réussi à attraper l’assassin donc ces attaques violentes continuent. Il y a une rumeur que Warren va quitter son emploi.

13 novembre 1888

La rumeur est vraie. On trouve une petite annonce le jour suivant: “Sir Charles Warren, chef de la police municipale, a donné sa démission à la suite du scandale causé par le nouveau crime de Whitechapel.”

14 novembre 1888

Les inspecteurs s’habillaient en effet en femmes et sortaient dans les rues de Whitechapel chaque nuit. Cependant, selon l’auteur, ces efforts étaient inutiles, parce que Kelly a été tuée chez elle.

Les femmes de Whitechapel ne sont pas d’accord sur l’apparence de Jack. Mais, elles ont toutes déclaré à la police qu’il portait un petit sac noir. La police a donc arrêté tous les hommes qui portaient un petit sac noir. Le problème? Tous les hommes d’Angleterre portent un petit sac noir. La police a promis l’immunité à tout complice de Jack, mais le public est assez certain qu’il tue seul. La récompense est maintenant de 25,000 francs.

Les Londoniens ont tellement perdu confiance en la police qu’ils ont organisé une force bénévole de détectives pour patrouiller dans les rues chaque nuit. Ils n’ont rien découvert.

21 novembre 1888

Un fruitier a entendu un homme dire qu’il croit que son cousin est Jack l’éventreur, juste parce qu’il correspond à la description de l’assassin. La police est en train d’enquêter sur lui.

L’auteur signale qu’on ne soupçonne jamais un anglais . Le public soupçonne toute personne qui ressemble, parle, ou s’habille comme un étranger. En bref, les Anglais sont nationalistes.

Mary Jane Kelly a été enterrée et une grande foule a assisté à la cérémonie. Mais, dit le journaliste, les gens ont exagéré la tristesse de la cérémonie. Il trouve que sa mort n’est pas seulement sans surprise, mais que Kelly le méritait à cause de son travail dangereux et honteux. À tout le moins, dit-il, elle ne mérite pas le degré de sympathie dont elle a fait l’objet. Ici, on peut constater une misogynie intense.

5 décembre 1888

Il n’y a pas de nouveaux meurtres dans Whitechapel depuis Mary Jane Kelly, et un nouveau chef de police a été nommé. La police attend un nouveau meurtre, espérant de nouveaux indices.


Mais ce meurtre n’est jamais passé et Jack l’éventreur n’a jamais été arrêté.

Reportage sur les meurtres de Jack l’Éventreur dans Le Figaro, septembre – décembre 1888

Contexte:

  • Les meurtres de Jack l’Éventreur (ou les meurtres de Whitechapel) étaient quelques meurtres commis par un tueur en série à l’automne 1888 dans le quartier de Whitechapel à Londres. 
  • J’ai lu un livre sur Jack l’Éventreur pendant l’été, avant lequel je ne savais pas beaucoup sur le sujet. 
  • Toutes les victimes étaient de pauvres prostituées

Mes questions de recherche:

  • Comment ces crimes violents étaient-ils décrits? 
  • Comment les écrivains ont-ils décrit les prostituées? 
  • Quelles étaient les théories pour les motifs/le coupable? 
  • Quels étaient les avis de la police et leurs efforts de trouver le coupable?

Mes conclusions provisoires:

  • les journalistes n’ont pas hésité à décrire les détails sanglants des meurtres
  • le public anglais soupçonnait que Jack était étranger ou juif
  • Les écrivains croyaient que les prostitues bien méritent d’être tué à cause de leur profession
  • Les écrivains ont dit du mal de résidents de Whitechapel (la pauvreté, la crime)
  • Le public anglais n’avait pas confiance dans les efforts de la police à trouver Jack l’éventreur et la police était complètement inefficace et désorganisée

Mes avis sur Bel Ami

Mes amies,

Depuis plusieurs jours, je ne pouvais pas éviter les discussions sur le nouveau roman de Guy de Maupassant, Bel-Ami. Dans les restaurants, dans les magasins, dans la rue — les Parisiens ne peuvent s’arrêter de parler de ce livre. Jusqu’à récemment, je n’avais pas lu le livre, parce que je ne suis pas un lecteur passionné des romans. En général, j’observe une règle: si la littérature comprend plus d’une page, je refuse de la lire. J’adore les chroniques et les feuilletons romains. Mais un roman entier, imprimé dans son intégralité? Non, merci! Cependant, après les nombreuses querelles de mes collègues, je l’ai finalement accepté et lu.

Je ne peux pas mentir, j’avais des difficultés à finir ce roman. C’était ennuyeux! Maupassant utilise les mêmes tropes que nous avons trouvé dans le classique de Honoré de Balzac, Illusions Perdues. Un jeune journaliste qui entre dans le journal, des personnages qui avident de pouvoir, un monde dominé par les hommes. Essayez quelque chose de nouveau! Nous avons déjà entendu cette histoire. Mais je dois admettre que ce genre d’histoire ne m’est pas étranger, parce que j’ai rencontré tellement d’hommes dans cette industrie, et ils sont les plus vils et manipulateurs que j’ai jamais rencontrés. Honnêtement, la grande majorité veut juste de l’argent, de pouvoir, et de femmes. C’est pourquoi je ne leur ferai jamais confiance. Si vous voulez perdre confiance en les hommes, entrez dans une salle de rédaction.

Je trouve donc amusant que Maupassant s’attende mieux de la part des journalistes. Qu’est-ce qu’il pensait pouvoir accomplir avec ce livre? Pensait-il que les journalistes s’asseyaient, lisaient le roman du début à la fin et décidaient soudainement: Hmm, peut-être que je ne devrais plus agir comme ça? Ou voulait-il que les lecteurs de journaux boycottent le journal, après avoir réalisé que les hommes derrière lui sont des dégénérés? Maupassant est indéniablement naïf. Ce livre ne changera pas assez les esprits des Parisiens pour transformer l’industrie du journal manipulatrice et exploiteuse.

Je suis d’accord avec mon collègue dans Le XIXe siècle sur quelques points dans son article, Question du jour. D’abord, ce serait ennuyeux si Bel-Ami était un bon homme. C’est insipide de lire sur un personnage qui suit toujours les règles et ne fait jamais rien de mal! Je suis aussi d’accord que Maupassant est un pessimiste qui ne voit pas de bien dans la société. Mon collègue écrit : «il semble avoir pris en haine la sottise, la platitude, la bassesse humaines, et cette haine l’absorbe au point de ne lui laisser voir que ce qui est soit, plat et bas.» Vous voyez, dans cette industrie, j’ai aussi rencontré des gens très créatifs, intelligents et travailleurs. Mais si on ne cherche que le mal, on ne verra jamais le bien. 

L’opinion de Maupassant sur la presse ne me surprend pas. C’est un homme mechant, arrogant, connu pour ne jamais cesser de se plaindre. Je connais des collègues qui refusent de passer plus de cinq minutes à parler avec lui en raison de sa nature extrêmement irritante. Pour cette raison, je n’ai pas l’intention de parler à M. Maupassant en face à face. Mais monsieur, si vous lisez ceci, voici mon conseil. Ayez un peu de conviction en l’humanité! Nous ne sommes pas tous si terribles, et si vous arrêtiez d’être aussi grincheux et prétentieux, peut-être que vous le verriez.

À la prochaine,

La Marquise de Mimizan

Nos Échos, Le Gaulois

Sophie et Miriam

Voici deux extraits des échos dans Le Gaulois, le 2 janvier 1884 et le 3 janvier 1884. Les échos sont trouvés sur la première page en bas sous le titre, Nos Échos, et le pseudonyme d’auteur est Un Domino. Les échos comprisent des bourses, des expositions du théâtre, des événements dans l’eglise catholique, une lettre d’un abonné, un musée rouvert, et des déesses et des maladies des personnes célèbres. Le ton de cette rubrique est très détendu.

Réponse à M. Millaud

Mes amis,

J’en ai tellement assez des hommes et de leurs opinions. Un homme forme une pensée cohérente, et tout à coup il croit qu’il est Socrate. Cette semaine, mon cher collègue Albert Millaud a partagé ce que j’ai trouvé être l’article le plus dramatique que j’ai lu au cours du mois dernier. Le monde du journalisme est pollué par des journalistes comme Millaud qui se croient plus intelligents que les autres et qui prétendent savoir ce qu’il est mieux pour la société.

Premièrement, permettez-moi de dire ceci: le but du journal est d’amuser, et les façons de le faire sont multiples. Millaud aime « les plus belles fables grecques et romaines » dont il parle, mais moi et beaucoup d’autres Parisiens ne les aiment pas. Quand j’ouvre le journal, je veux glousser. Je veux causer avec mes amis sur les sujets triviaux que j’ai lus le matin. C’est pourquoi j’aime ce que je fais – j’ai l’opportunité de partager des petits moments de plaisir avec mon public et de voir la joie qu’il leur apporte.

La popularité du reportage est excellente pour mon entreprise. Je gagne plus d’argent que jamais, et je n’ai pas peur de l’admettre. Il faut dire que la richesse était mon but. Certains croient sûrement que les journaux sont faits pour rapporter des faits, et il est necessaire que les écrivains publient les articles les plus intellectuels et sophistiqués. Je ne suis pas l’un d’entre eux, et je ne fais pas cela. Je suis sûr qu’il y a de grandes parties du journal que mes lecteurs ignorent parce qu’elles sont ennuyeuses, prétentieuses, ou peu attrayantes, et je ne vois pas cela comme un problème. Ils paient pour lire mes chroniques, c’est tout ce qui m’importe.

Pourquoi croit Millaud que c’est mal pour le journal de gagner de l’argent comme objectif? C’est une entreprise, nous essayons tout juste de gagner un salaire décent. Quelqu’un comme Millaud qui a ratissé grâce au journal ne peut pas se plaindre de quelqu’un qui veut faire la même chose. Ne vous inquiétez pas de ce que les autres journalistes écrivent; cela ne fera que vous distraire de votre travail. Et si vous n’aimez pas ses articles, ne les lisez pas. Si vous détestez que les gens écrivent pour leurs « dix francs de lignes, » avez-vous considéré l’état de notre économie? Pourquoi ne pas critiquer les conditions qui rendent la survie si difficile? 

Le reportage donne à tous quelque chose à discuter, quelque chose à attendre chaque jour. Peu importe si leur journée va mal, ils peuvent lire quelque chose d’amusant. Les journaux sont pour le peuple, pas juste les aristocrates, et c’est pourquoi j’étais particulièrement offensée par la déclaration que le journal moderne est « tout simplement un ramassis de ragots, dans le genre de ceux qui domestiques échangent en dinant. » En autre, les journaux sont imprimés tous les jours pour une raison – chaque jour il y a quelque chose de nouveau à lire et à penser. Avec ce rythme, qui est un bon rythme, tous les articles ne seront pas la meilleure littérature qu’on a jamais lue.

J’ai aussi lu l’article de Giffard, que j’ai beaucoup aimé. Giffard a soulevé deux points importants. Premièrement, avec l’augmentation du reportage, le monde des journaux gagne de nouveaux journalistes fantastiques et « un personnel de plus en plus instruit, » contrairement à ce que Millaud a dit. Deuxièmement, le journalisme français est, et reste toujours, « très alerte et très vivant. » Paris est une ville pleine d’action, et elle mérite des journaux qui puissent suivre.

Enfin, ce serait une injustice pour le public si je ne partageais pas une rumeur que j’ai entendue récemment. Lors de son récent voyage aux états-unis, mes sources me disent, une maîtresse de Millaud l’a trompé avec un journaliste américain. D’après certaines informations, Millaud était furieux quand il a appris cette information. Donc, je ne pense pas que c’est une coïncidence que Millaud ait publié un article aussi critique du style de journalisme américain.

À la prochaine,

La Marquise de Mimizan

Critique du reportage dans La Patrie

Voici une critique positive de l’article de Millaud dans La Patrie, un journal nationalist. Cet article est publié le 7 mai 1886. L’auteur résume l’argument de Millaud, et il est d’accord avec l’idée que le reportage tuera le journalisme. Il ajoute un paragraphe puissant:

Il y a une foule d’imbéciles que le fait de voir le public mis au courant de leurs faits et gestes, met en liesse. Leur vanité ne pouvait échapper aux reporters qui s’en font de la copie ! Chose fort naturelle! Ce qui nous étonne, c’est qu’il se trouve des gens pour lire tout ce fatras, pour s’égayer de tous ces potins, pour consacrer une minute de leur vie, pourtant si courte, à ces inepties.

La Patrie, 1886

Honoré de Balzac, Illusions perdues (2ème partie)

Introduction

  • 20 mai 1799 – 18 août 1850
  • Né dans une famille bourgeoise mais pas financièrement stable
  • 1819 – devenu romancier mercenaire
    • a appris qu’il faut avoir l’indépendance et la fortune pour publier les arts écrits
  • 1829: le Gars (Les Chouans) – premier roman populaire, contre le libéralisme
  • opinions politiques
  • 1830: écrivait des chroniques politiques et des contes pour quelques journaux
  • écrit de la vie privée
  • 1836:
    • La Chronique de Paris – un grand échec
    • a quitté Paris et a commencé à écrire Illusions Perdues
    • Girardin a fondé le roman feuilleton dans son nouveau journal La Presse
  • 1837-1843: Illusions perdues publié – un grand succès
  • Des personnages complexes, réels
  • Obsédé par l’argent, têtu
  • Mort d’épuisement

Source: Honoré de Balzac, Larousse

Réception

  • Tres négative
  • a nui à sa réputation
  • tout n’est pas corrompu
  • Une vengeance
  • “dégoûtant et cynique”

Jamais M. de Balzac n’avait jamais poussé à un degré aussi déplorable, l’abus de ces locutions vicieuses, de ces tours embarrassés, de ces descriptions diffuses et de cette prétention à la profondeur intellectuelle qui font de ses romans un pendant curieux aux livres embourbés et pâteux qui florissaient en France, avant que Malherbe vint. Telle est la publication dernière de M. de Balzac. Dieu veuille, pour nous et pour son libraire, que ce soit en outre sa dernière publication

Le Figaro, 1839

ce cloaque, qu’il appelle un livre

Le Commerce, 1839

Nous ne jugerons son œuvre que par ses côtés littéraires. Vue ainsi, elle a sans doute des parties fort belles, mais elle pèche dans le ton général, dans l’harmonie du plan, dans la vérité des caractères. Aucun des personnages de ce livre n’appartient à la vie réelle ; il faut aller au bagne pour trouver d’aussi grands scélérats, des monstres aussi niais, des coquins aussi stupides.

Le Constitutionnel, 1839

Sources: L’accueil glacial des « Illusions perdues » de Balzac dans la presse, sur Retronews et Les journalistes étaient-ils tous pourris à l’époque de Balzac ? sur Radiofrance

Questions de discussion

Quelles sont les plaintes de Balzac par rapport à l’état du journalisme?

Le livre, fút-il un chef-d’œuvre, doit devenir sous ta plume une stupide niaiserie, une œuvre dangereuse et malsaine.

Illusions perdues, page 402

Tu commenceras par trouver l’œuvre belle, et tu peux t’amuser à écrire alors ce que tu en penses. Le public se dira : Ce critique est sans jalousie, il sera sans doute impartial.

Illusions perdues, page 403

Pourquoi est ce que Lucien ne peut pas critiquer trop Nathan? Qu’en pense Lucien?

Dans ce moment-ci, tu es, à ses yeux, un espion, une canaille, un drôle; après-demain tu seras un grand homme, une tête forte, un homme de Plutarque! Nathan t’embrassera comme son meilleur ami.

Illusions perdues, page 423

Pourquoi doit-on utiliser plusieurs signatures différentes? Quel est l’effet?

samedi prochain, tu feras une feuille dans notre Revue, et tu la signeras DE RUBEMPRÉ en toutes lettres. Dans ce dernier article, tu diras : Le propre des belles œuvres est de soulever d’amples discussions. Cette semaine tel journal a dit telle chose du livre de Nathan, tel autre lui a vigoureusement répondu. Tu critiques les deux critiques C et L.

Illusions perdues, page 426

Pourquoi est-ce que les supérieurs de Lucien lui dit de ne pas trop investir dans son écriture? Qu’en pensez-vous?

Tu pensais donc ce que tu as écrit? dit Hector à Lucien. Oui. Ah! mon petit, dit Blondet, je te croyais plus fort!

Illusions perdues, page 421

mais des articles lus aujourd’hui, oubliés demain, ça ne vaut à mes yeux que ce qu’on les paye.

Illusions perdues, page 422

Quelle est l’influence de l’argent sur le travail de Lucien?

je suis incapable d’écrire deux mots d’éloge sur ce livre… Tu auras encore cent francs, dit Merlin.

Illusions perdues, page 425

Ils ont raison! s’écria Lucien quand il fut seul avec Coralie, les hommes doivent être des moyens entre les mains des gens forts. Quatre cents francs pour trois articles! Doguereau me les donnait à peine pour un livre qui m’a coûté deux ans de travail.

Illusions perdues, page 426

La Marquise de Mimizan: Ragots de la rue

Mes amis –

Cette semaine à Paris, les rues sont remplies de ragots – plus que d’habitude. Une promenade dans la ville il y a quelques jours a révélé les secrets les plus juteux de la ville. 

La semaine dernière, le cadavre d’un homme a été découvert derrière un restaurant à Paris, une balle dans la tête. Les détectives au scène de crime ont decidé que c’était un suicide, et pendant plusieurs jours, les parisiens ont cru cette explication. Mais récemment, quelques personnes ont formé de nouvelles idées. À l’extérieur d’un magasin au coin, un groupe de quatre ou cinq femmes bien habillées discutent des faits. Ils croient que c’était un meurtre.

Évidemment, la femme de cet homme, que nous appellerons Mme. P, avait un petit ami qu’elle avait visité en secret pendant plusieurs mois. Mais son mari a commencé à soupçonner qu’elle le trompait. Tard dans la nuit, par coordination ou coïncidence, les deux hommes ont échangé des mots derrière le restaurant. La conversation s’est transformée en cris, et le petit ami a sorti un pistolet. 

Une femme du groupe dit que le petit ami a été blessé, mais une autre nie. Elle travaille dans un hôpital près du restaurant, dit-elle, et ils n’ont reçu aucun patient avec des blessures par balle cette nuit. Elle insiste qu’il s’est échappé sans être grièvement blessé. Une autre femme dit qu’elle a entendu que la femme et son petit ami avaient maintenant l’intention de fuir le pays ensemble.

Dans un quartier de l’autre côté de la ville, j’entends des plaintes au sujet d’un chien qui terrorise les voisins, parce qu’il n’arrête jamais d’aboyer. Toute la journée et toute la nuit – quand les bonnes sortent les poubelles, quand les pères rentrent du travail, quand les mères mettent leurs enfants au lit – le chien aboie. 

La propriétaire de ce chien, Mme. A, est plutôt âgée et souffre de solitude depuis le décès de son mari l’année dernier, disent les voisins. Cette solitude l’a poussée à prendre un chien de la rue. Les voisins ont parlé directement à Mme A en plus d’alerter la police, mais rien n’a été fait. 

Deux adolescents rentrent de l’école en portant leur uniforme et leurs sacs à dos. Une des bonnes, affirme l’une, est devenue si furieuse qu’elle a jeté une pierre dans la fenêtre de Mme A. Cela a provoqué un fort cri. Mme. A a menacé d’obtenir une ordonnance restrictive contre cette bonne et a demandé qu’elle soit virée.

Dans un quartier plus modeste, beaucoup de gens sont en colère contre le facteur. Ils disent qu’il arrive irrégulièrement, parfois une semaine sans rien recevoir. Le facteur, disent-ils, est un ivrogne. Il ne se sent pas concerné par son travail. Quand le courrier est arrivé, c’est en désordre. Les gens reçoivent du courrier qui appartient à leurs voisins. Les enveloppes sont déchirées, pliées, et endommagées. Une femme âgée affirme que, en raison du comportement négligent du facteur, elle n’a toujours pas reçu l’invitation au mariage de son fils. Une jeune mère répond que, la connaissant, elle n’a peut-être pas été invitée.

Enfin, une pièce de théâtre a suscité un certain débat cette semaine – mais pour les mauvaises raisons. Selon un groupe de jeunes femmes à l’extérieur du théâtre, l’acteur principal a plus de trois enfants hors mariage. Plusieurs femmes ont affirmé qu’il avait promis de les épouser, mais puis il les a quittées pour poursuivre sa carrière. L’acteur a nié les allégations, affirmant que ces femmes veulent juste la célébrité et l’argent.

Je suis vraiment enthousiaste d’entendre comment ces histoires se développent. De plus, mes sources me disent qu’une famille aristocratique très populaire attend un enfant. J’enquêterai sur cette histoire la semaine prochaine.

À la prochaine,

La Marquise de Mimizan