Chronique 3, Sophie Hauck

Cher lecteur, avez-vous lu Bel Ami, le roman de Guy de Maupassant sur la corruption et des scandales dans la presse ? Hier matin, j’ai commencé le livre après avoir lu les journaux comme d’habitude, à côté de mon chat, Secret, et je n’ai pas pu l’arrêter ! 

Par tombée de la nuit, j’ai fini Bel Ami, et ouah ! En tant que rédactrice dans la presse, bien sûr j’ai beaucoup d’opinions sur le texte, et j’en partagerai tous avec vous ici !

Bel Ami suit Georges Duroy, un ex-soldat de l’Algérie qui retourne à Paris. Après avoir rencontré un ancien contact, un homme puissant qui s’appelle Forestier, Duroy commence le travail au journal, où il couvre des petits événements au début, mais avec le temps, il devient le rédacteur en chef. Son ascension est grâce à Madeleine Forestier, la femme de Forestier qui aide avec le style de Duroy en premier, avant de transformer ses articles finalement avec son point de vue unique et sa compréhension profonde de l’actualité. Elle côtoie avec des hommes politiques, qui eux donnent connaissance interne qui permettent à Duroy d’exercer une influence politique. Il commence à utiliser le pseudonyme Du Roy, qui a l’air qu’il est un membre de la famille royale.

Il commence une liaison avec une amie de Forestier, une mondaine influente qui s’appelle Mme de Marelle. Mais en même temps, Duroy essaye de commencer une liaison avec Madeleine, et bien qu’elle dit non au début, leur idylle commence quand son mari, Forestier, meurt. Avec le temps, les autres rédacteurs se moquent de Duroy, parlant que sa femme écrit tous ses articles comme Forestier, et Duroy devient aigri et jaloux que peut-être Madeleine trompe. Il travaille avec la police pour découvrir cette infidélité, et il confirme ses soupçons. Bien qu’il soit couronné de succès à la fin de Bel Ami, il est tout seul. 

Cher lecteur, le grand débat sur Bel Ami maintenant est si l’écrivain Guy de Maupassant était trop pessimiste quand il a écrit ce roman. Maupassant nuit à la réputation de la presse en écrivant cet histoire, des critiques disent ! Est-ce que cette corruption passe vraiment dans les journaux en coulisse ? Mais Maupassant était un journaliste à l’époque, et il n’imaginerait pas des détails du métier pour créer une intrigue intéressante, n’est-ce pas ? 

En tant que rédactrice dans la presse, je sais direct qu’il y a la corruption, le plagiat, la misogynie dans beaucoup de journaux — c’est pourquoi je suis partie de l’industrie. En même temps, je voudrais croire que la majorité de journalistes ne veulent pas abuser de leur pouvoir pour gagner l’influence et l’amour. 

Maupassant a publié une chronique sur la causerie en 1882 — trois années avant le début de Bel Ami — qui peut rappeler certaines scènes de Bel-Ami. Il a dit « Causer! qu’est cela? Causer, madame, c’était jadis l’art d’être homme ou femme du monde; l’art de ne parai-tre jamais ennuyeux, de savoir tout dire avec intérêt, de plaire avec n’importe quoi, de séduire avec rien, du tout. » 


Je trouve que Bel Ami est un commentaire sur pas seulement la corruption dans la presse, mais aussi une histoire au sujet de la manipulation entre des collègues, des politiciens, et des amants, et pour moi, Manon Mystère, je pense que ce n’est pas trop pessimiste. Maupassant est un réaliste, et en étant un peu dramatique ou exagéré, il peut gagner les yeux de tout de France pour voir le côté obscur de la presse et la nature humaine.

Chronique 2, Sophie Hauck

Cher lecteur, est-ce que vous avez vu le débat brûlant en France cette semaine ? Si non, laissez-moi vous expliquer le débat Giffard-Millaud, et bien sûr je donnerai mon avis sur le sujet aussi ! 

Vous connaissez les deux rédacteurs, qui s’appellent Albert Millaud et Pierre Giffard ? Millaud est un chroniqueur, et Giffard est un reporter, et cette semaine, ils ont écrit deux articles au sujet des effets de la presse sur la littérature. Ils ont créé un scandale dans les pages du Figaro — une guerre des mots ! 

Le 6 mai, Millaud a écrit que « le journalisme a tué la littérature et le reportage est en train de tuer le journalisme. » En premier, quand la littérature régnait en maître, Millaud a dit qu’ « on préférait la gloire à l’argent et l’on était quelqu’un par ses idées, sa forme, son originalité propre, sa signature. » Au début du journalisme quotidien, les « hommes de valeur » dans l’industrie « ont apporté leurs mots charmants, leurs spirituelles réflexions, leurs commentaires humoristiques, » mais Millaud a continué, disant que « le journal, avec sa gloire immédiate, son gain tout de suite réalisé, sa publicité puissante, son succès rapide, s’emparait de l’écrivain et tuait le livre. »

Des lecteurs n’avaient plus l’intérêt à lire des géniaux œuvres de la littérature, et les écrivains qui, à l’époque, écrivaient ces livres ont brûlé d’envie d’avoir l’argent que les journalistes ont gagné, Millaud a écrit. Le cycle se répète, cette fois avec le reportage, qui vainc le journalisme. « La Presse, c’est à dire la représentation la plus absolue, la plus répandue de la littérature contemporaine, appartient non pas au plus instruit, au plus savant, au plus spirituel, mais au mieux informé ou au plus audacieux. » Il a peur qu’ — avec la popularisation du reportage en France — le lecteur français vont devenir comme le lecteur americain, qui « est encore un lecteur dans l’enfance, incapable de comprendre les grandes choses de l’art et de la littérature. » Il stresse que le débat entre la littérature et la presse soit vraiment une lutte pour l’esprit et l’âme de la France.

Le jour suivant, Giffard a écrit une réponse qui s’appelle Journalisme & Reportage, et il critique Millaud autant qu’il critique son opinion sur la presse. Il dit que « Millaud est le plus juvénile et le plus fin représentant d’une école que je qualifierai d’antérieure, pour ne point chagriner la coquetterie de ses adeptes. » Cette vue de la presse est vielle jeu, Giffard écrit, donc il va se rallier à la nouvelle école du journalisme quotidien. Avec des nouveaux outils comme les téléphones et les télégraphes, la presse a dû changer, Giffard écrit, et Millaud doit avoir confiance que la presse et les lecteurs français ne perdront pas tout de leur goût pendant cette évolution.

 « Le public français a du goût, » Giffard écrit. « Il ne s’attachera nullement à ces billevesées américaines dont on a tant sujet de s’irriter. Non, mais il lui faut du reportage tout de même. Et ce reportage, il l’exigera de plus en plus des journaux, à la condition qu’on le lui donne sous une forme littéraire, avec le souci de ne pas le choquer, et aussi de ne pas le tromper. »

J’imagine, cher lecteur, que vous voulez savoir ce que je pense du débat, non ? Je vois ce que Millaud dit, et je comprends ses soucis sur le futur de l’intelligence française si on n’étudie pas la littérature, l’art, et la culture en général comme on fait maintenant. En même temps, la presse nous donne de l’information importante au sujet de la politique mondiale, le gouvernement parisien, et aussi, la nouvelle en art et culture ! Sans cette information, on perd une autre vue du monde — en particulier, pour la classe moyenne, qui peut-être ne peuvent pas accéder à la littérature mais qui souhaite gagner la connaissance.  
Sous l’article de Millaud, il y a une partie du journal qui s’appelle Les Échos de Paris. Ce fait, cher lecteur, m’explique exactement qui va gagner cette guerre entre la littérature, le journalisme, et le reportage, qu’on le veuille ou non.

Manon Mystère

[Recueil. Oeuvre de Adams & Stilliard. Photos-cartes de visite]
Adams, Arthur Walton (1842-1934). Photographe (Gallica)

Manon Mystère est une chroniqueuse qui habite à Paris avec son chat. Ensemble, ils lisent beaucoup de journaux tous les jours — Le Figaro, Le Petit Parisien, Le Journal Des Débats — autour d’une tasse de chocolat chaud pour Manon, et un bol de lait pour son chat, qui s’appelle Secret. Manon pense que la liberté de la presse est première, et elle veut écrire des articles qui protègent cette liberté et combattent contre la censure. 

Elle a essayé de travailler à son journal préféré à Paris, mais seuls des hommes y travaillent, et ils étaient dédaigneux quand elle a essayé de faire un entretien d’embauche. Elle a considéré utiliser un pseudonyme masculin pour publier ses chroniques, mais elle connaît d’ autres femmes dans l’industrie du journalisme, et elle veut utiliser sa féminité pour gagner les meilleures interviews, ragots, et d’ autres informations qui intéressent ses lecteurs. 

Les gens que Manon Mystère côtoie viennent de tous les domaines de la vie, donc elle entend la plus fraîche nouvelle au sujet de la politique, l’art, la littérature, et les autres sujets que tous les Parisiens trouvent intéressants. Personne ne sait qu’elle est la vraie Manon Mystère, alors elle doit se faufiler dans les rues de Paris en silence.

Chronique 1, Sophie Hauck

Qu’est-ce que c’est la responsabilité de la presse, vous vous demandez ? Pour moi, Manon Mystère, la presse doit montrer à tout le monde les histoires qu’ils ne voient pas souvent — ou peut-être, ce qu’ils ne peuvent pas voir. Par exemple, s’il y a une boulangère qui se lève tôt chaque matin pour faire le pain que tout le village mange, la presse devrait écrire un portrait d’elle. Qu’est-ce qu’elle aime faire en plus de cuire, et est-ce qu’il y a des faits intéressants ou surprenants de sa carrière que personne ne sait pas ? En partageant ces histoires jamais racontées, des journalistes peuvent honorer les vies des gens quotidiens — les boulangers, les éboueurs, les facteurs… 

Ou la presse devrait dévoiler la corruption dans ces industries. Peut-être cette boulangère ne paye pas d’impôts en échange de donner du pain gratuit aux élus. Ça n’est pas juste, mais ces affaires louches peuvent passer s’il n’y a pas quelqu’un qui surveille le gouvernement, les chefs d’entreprises, et les autres gens puissants en société. Aux États-Unis, il y a deux expressions qui représentent mon attitude sur la responsabilité de la presse: « Democracy dies in darkness,  » et « Sunlight is said to be the best of disinfectants. » En français, cela veut dire que la démocratie meurt dans le noir, et la lumière du soleil est le meilleur désinfectant. En d’autres termes, la démocratie ne fonctionne pas — ou ne dure pas — sans la presse parce que de la corruption est l’ennemi de la démocratie, et des journalistes révèlent la corruption. En fait, ce sont les chiens de garde qui protègent les intérêts des citoyens. 

En ce moment, je dois dire que mes espoirs ou mes attentes de la presse ne sont pas réalistes à l’heure actuelle. Pendant cette époque, la presse est un commerce, et souvent leur style est trop simpliste. Par exemple, si quelqu’un meurt, l’article qui annonce leur mort ne décrit pas les détails de leur vie — leurs rêves ou leurs passions. Maintenant, les journalistes n’ont pas un esprit volontaire ou un sens du devoir quand ils écrivent. Ils essaient de vendre autant de journaux que possible sans trop d’efforts, et puis ils ne découvrent pas les détails cachés de la vie quotidienne. Ils ne mettent pas au jour les secrets du gouvernement. Ils ne se rendent pas compte qu’ils pourraient gagner plus d’affaires s’ils écrivaient plus d’articles significatifs qui ajouteraient de la valeur au public français. Par exemple, si la boulangère ne paye pas ses impôts parce qu’elle a fait un marché de façon déloyale avec ses élus, le public français veut savoir au sujet de cette corruption. Et ils veulent lire les profils sur leurs voisins parce que la réalité intéresse les vrais gens.

Au futur, j’imagine un monde en lequel la presse écrit au sujet de chaque topique — de la santé, du sport, de la religion. On aime admirer de l’art, du cinéma, de la cuisine. Pourquoi est-ce qu’on ne peut pas admirer le journalisme en tant qu’art ? Pour moi, Manon Mystère, la presse a une responsabilité essentielle, alors les journalistes doivent ressentir ce sentiment de responsabilité. Puis, ils peuvent gagner plus de responsabilité et écrire au sujet des topiques plus intéressants que la vie quotidienne. Ils peuvent avoir des conversations avec des leaders mondiaux, des célébrités, et puis, quelqu’un deviendra connu parce qu’un journaliste a écrit au sujet de cette personne. En fait, les journalistes du futur deviendront connus parce que ce qu’ils en écrivent est important. Bien sur, la responsabilité de la presse n’est pas au sujet de gagner de l’adoration, mais je sais que si on confie plus d’attention aux journalistes, ils nous récompenseront en assurant que la démocratie ne meurt pas dans le noir. Après tout, la lumière du soleil est le meilleur désinfectant.

Le Paulois Eveillé: Portrait d’un Paris qui suffoque sous le poids de ses ambitions

Maupassant ne pouvait mieux choisir qu’un pseudonyme évocateur tel que Bel-Ami pour son roman phare. Cet ouvrage, que j’ai dévoré dans le vacarme de Paris, m’a laissée oscillant entre admiration pour la plume de l’auteur et répulsion pour son tableau de notre société. Les critiques sont partagées, comme j’ai pu le constater dans les colonnes des journaux tels que Le Gaulois et Gil Blas. Certains saluent son talent indéniable, tandis que d’autres dénoncent l’intensité de son naturalisme, créant un portrait aussi intense qu’il en devient un miroir dérangeant de notre époque​. Ce commentaire rejoint mon propre malaise : est-il nécessaire de peindre le vice avec autant de détails pour le dénoncer ? En tant qu’enfant du Sud-Ouest, attachée aux valeurs de simplicité et d’authenticité, je me demande si ce roman n’incarne pas justement ce que Maupassant critique : l’appât du gain et l’opportunisme, même dans les hautes sphères littéraires.

Au cœur du récit se trouve Georges Duroy, ou plutôt Bel-Ami, ce séducteur implacable qui, par le biais de ses conquêtes féminines et de sa ruse, escalade les échelons du journalisme parisien. Dès ses débuts modestes, il manipule et charme son entourage, à commencer par Mme Forestier, qui lui offre non seulement un accès au métier mais aussi ses premiers articles. Maupassant ne fait preuve d’aucune clémence envers son personnage. Bel-Ami est un opportuniste qui, bien qu’ironique et charismatique, manque cruellement de conscience morale. En somme, un reflet cru de ce que la société, dans sa quête de succès rapide, peut produire.

Dans Gil Blas, Maupassant lui-même répond aux critiques en affirmant que Bel-Ami n’est pas une attaque contre toute la presse, mais une exploration d’un milieu interlope où la corruption règne​. Pourtant, en lisant cette défense, je m’interroge sur la frontière entre la critique sociale et l’encouragement implicite. Car si le vice triomphe si facilement dans les pages du roman, qu’est-ce que cela dit de notre propre lutte contre ces forces ?

À travers Duroy, Maupassant explore un Paris rongé par l’ambition et la soif de pouvoir, une ville où les principes de respect et d’éthique semblent relégués au second plan. Cela me rappelle l’œuvre de Balzac, notamment Illusions perdues, où le jeune Lucien de Rubempré, bien que talentueux, succombe aux mêmes travers d’un monde où tout s’achète. Mais là où Balzac laisse entrevoir une rédemption ou du moins un espoir pour ses personnages, Maupassant, lui, semble déclarer que la corruption est omniprésente et difficile à surmonter.

À ceux qui louent Bel-Ami comme une critique audacieuse, je réponds : le courage ne réside-t-il pas aussi dans la recherche d’un équilibre entre vérité et inspiration ? Si nous voulons construire une société où le respect de la nature humaine peut s’épanouir, peut-être devons-nous aussi exiger des auteurs qu’ils montrent, non seulement les ténèbres, mais aussi une lumière, aussi fragile soit-elle.

Ainsi, malgré ma reconnaissance pour le talent de Maupassant, je m’interroge : Bel-Ami est-il une œuvre qui appelle à l’éveil des consciences ou simplement un tableau où le spectateur, fasciné par l’horreur, reste figé dans l’inaction ? Il appartient à chacun de décider. Quant à moi, dans mon combat contre les injustices, je choisis de rêver d’un monde où la plume peut transformer la boue en espoir.

Le Paulois Engagé: Le Reportage, Arme du Progrès Social

Paris, cette ville où les puissants dictent les règles, où les classes populaires s’efforcent de respirer, a besoin d’un nouveau souffle. Et ce souffle, c’est le reportage. Oui, je parle bien de ce genre journalistique que certains, comme Millaud, méprisent. Mais moi, je vois en lui un outil puissant, une arme de la vérité au service des opprimés, un moyen de dénoncer les injustices écolo-sociales qui gangrènent notre capitale.

Le reportage est la clé pour donner une voix à ceux qui n’en ont jamais eu. Quand je pense aux quartiers ouvriers de Paris, étouffés par les fumées industrielles, je ne peux m’empêcher de penser à tous ces hommes, ces femmes et ces enfants que la société oublie. Qui les écoute? Qui s’en soucie? Certainement pas ces grands écrivains qui, bien à l’abri dans leurs salons bourgeois, écrivent pour une élite. Non, ceux qui s’intéressent au sort de ces familles, ce sont les reporters qui s’aventurent dans les ruelles sombres, qui prennent des notes sur les conditions de vie inhumaines et qui portent ces réalités à la connaissance du public.

Giffard a raison: le reportage est le journalisme du présent et de l’avenir. Il ne se contente pas de raconter des anecdotes amusantes pour divertir quelques lecteurs aisés. Non, il plonge dans la réalité, il capte la misère, l’injustice, la souffrance, et les montre au grand jour. C’est cette vérité que nous devons défendre, c’est cette vérité qui changera les choses. Quand un reporter s’aventure dans une usine, qu’il décrit les vapeurs toxiques que les ouvriers respirent, qu’il montre les enfants malades, il fait plus que du journalisme: il fait un acte politique, il appelle à la justice.

Millaud parle d’un temps où la littérature était reine, où les chroniques avaient “forme et ragoût littéraire”. Mais de quelle utilité est cette beauté littéraire si elle ne sert qu’à orner les étagères des bourgeois? Le reportage, lui, a une utilité concrète: il informe, il alerte, il mobilise. Ce n’est pas seulement une question de style, c’est une question de justice. Je préfère mille fois un article qui décrit la réalité crue d’un quartier populaire, à un texte littéraire, aussi beau soit-il, qui ne parle que des préoccupations que la majorité de la population ne s’identifie pas.

La nouvelle presse que défend Giffard est celle qui va sur le terrain, qui se salit les mains, qui se confronte à la réalité. Elle n’a pas peur de dire les choses telles qu’elles sont, de montrer la laideur du monde quand il le faut. Et c’est précisément cette honnêteté qui permettra de changer les choses. Le reportage est une forme de littérature engagée, une littérature qui agit. Pour moi, le vrai courage n’est pas d’écrire de belles phrases, mais de s’aventurer dans les endroits où personne ne veut aller, de parler aux gens que personne n’écoute, de montrer ce que personne ne veut voir.

Il est facile de critiquer le reportage, de le qualifier de “potin” ou d'”indiscrétion”. Mais ceux qui parlent ainsi n’ont jamais mis les pieds dans les quartiers ouvriers, ils n’ont jamais respiré l’air empoisonné des faubourgs, ils n’ont jamais vu les enfants jouer dans des rues noires de suie. Le reporter, lui, y va. Il y va pour voir, pour comprendre, pour raconter. Et c’est cette honnêteté, cette volonté de montrer la réalité, qui fait du reportage un outil de changement.

Je le dis sans détour: le reportage est l’arme la plus puissante dont dispose le journalisme moderne pour combattre les injustices. Il est le moyen de rendre visible l’invisible, de donner une voix aux sans-voix, de faire entendre le cri de ceux que l’on veut faire taire. Et c’est pour cela que je soutiens le reportage, que je soutiens Giffard, que je me tiens aux côtés de tous ceux qui, plume en main, n’ont pas peur d’affronter la réalité.

Le journalisme n’est pas un simple divertissement, il est un engagement. Et moi, M. Le Paulois Engagé, je continuerai à me battre pour une presse qui défend la justice, qui défend les opprimés, qui ne se contente pas de raconter des histoires mais qui change la réalité. Parce que Paris a besoin de justice, parce que Paris a besoin de vérité, parce que Paris a besoin de reporters.

M. Le Paulois Engagé

Le Paulois Engagé: Paris éttouffé

Ah, Paris ! Ville de promesses et de périls. Dans cette capitale où chaque pierre murmure des rêves, une ombre pesante s’étend sur les trottoirs : celle des cheminées d’usines. On les voit partout désormais, ces colonnes de fumée, dressées comme des griffes de fer qui lacèrent le ciel. Elles portent le sceau du “progrès”, mais à quel prix ?

Les rues qui jadis résonnaient des cris des marchands, des rires des enfants et du pas rapide des artisans sont aujourd’hui envahies par une atmosphère lourde et grise. Dans les quartiers industriels, il ne s’agit plus de trottoirs peuplés de promeneurs élégants ou d’ouvriers joyeux. Non, c’est le royaume des ombres : hommes et femmes aux visages noircis, leurs traits effacés par la fatigue et la suie. Ce sont les serviteurs silencieux des machines modernes, ces monstres insatiables qui dévorent les heures, la santé et même l’espoir.

Voyez-les, ces ouvriers ! La chemise trempée de sueur, le dos courbé, ils sortent à peine des usines que déjà leur souffle est court, leur regard vide. À leur place, nous promenerions-nous dans les rues de Paris avec le même orgueil ? Nous oserions peut-être répondre, comme les bourgeois au balcon : “Tout cela est nécessaire.” Mais que nous enseigne cette “nécessité”? Que la richesse d’un petit nombre doit être bâtie sur la misère des masses ? Que le ciel bleu de notre jeunesse peut se ternir sans regrets ?

Le pire, chers lecteurs, n’est pas ce que l’on voit. C’est ce que l’on respire. Ces fumées âcres, qui semblent flotter au-dessus des toits comme des nuages rebelles, s’immiscent partout. Dans chaque souffle pris par un ouvrier, dans chaque repas partagé par une famille, se cache un poison lent. Les médecins s’alarment, mais leurs voix sont étouffées par le bruit des marteaux et des machines. Les industriels, eux, parlent d’ “innovation” et de “modernité”, détournant les regards des maux qu’ils infligent.

Prenons l’exemple de cette usine pétrochimique récemment installée aux portes de la ville. Sous prétexte de produire des lampes à gaz, elle produit surtout des veuves et des orphelins. Les travailleurs y inhalent des vapeurs toxiques tout en manipulant des substances qu’ils ne comprennent pas, car personne ne leur explique. Pourquoi le ferait-on ? Leur vie vaut-elle le coût d’une précaution ? Apparemment non. Leur existence est comptée en heures d’efforts, non en années de bonheur.

Et les rivières ? Ah, la Seine ! Ce fleuve majestueux, jadis miroir des ponts et des palais, est devenu le réceptacle des eaux usées et des débris industriels. Les poissons meurent, les berges puent, et pourtant, on ferme les yeux. Ce n’est qu’un “dommage collatéral”, dit-on. Les ouvriers, eux, voient cette eau comme leur dernier luxe, leur seul moyen de se rafraîchir après une journée harassante. Mais qu’ils osent y plonger un pied, et c’est leur santé qui en paiera le prix.

Devons-nous accepter cette tyrannie des machines et de leurs maîtres ? Moi, Le Paulois Engagé, je dis non. Non à ce mépris des corps et des âmes. Non à cette destruction insidieuse de la nature qui nous a tous nourris, moi y compris, dans ma jeunesse béarnaise. À Pau, nous respections la terre parce qu’elle nous donnait tout. Ici, à Paris, on la méprise comme si elle était une servante fatiguée.

Alors, que faire ? Peut-être commencer par parler. Par nommer ces injustices qui s’abattent sur les plus faibles. Par écrire, toujours écrire, pour que la fumée ne recouvre pas la vérité. Ce n’est qu’un début, mais un début nécessaire. Car si les ouvriers sont forcés au silence, nous, qui avons encore une plume et une voix, devons hurler pour eux.

Je vous invite, chers lecteurs, à regarder cette ville autrement. Ne voyez pas seulement ses belles avenues, ses lumières éclatantes et ses vitrines luxueuses. Voyez aussi ses ombres, ses poumons noirs et ses rivières souillées. Paris suffoque, et avec elle, ses habitants. Si nous n’agissons pas, bientôt, ce ne sera plus la “Ville Lumière”, mais un tombeau fumant pour les rêves de ses enfants.

Le progrès ne vaut rien s’il coûte l’humanité. Paris doit respirer, et ses ouvriers aussi. Pour cela, il faudra lutter. Et moi, Le Paulois Engagé, je lutterai. Avec ma plume pour arme, je continuerai à dénoncer, pour que le souffle coupé des opprimés devienne un cri qui résonne dans toutes les rues de cette capitale.

À la semaine prochaine, sous une lumière que nous aurons peut-être sauvée.

Le Paulois Engagé

Mes avis sur Bel Ami

Mes amies,

Depuis plusieurs jours, je ne pouvais pas éviter les discussions sur le nouveau roman de Guy de Maupassant, Bel-Ami. Dans les restaurants, dans les magasins, dans la rue — les Parisiens ne peuvent s’arrêter de parler de ce livre. Jusqu’à récemment, je n’avais pas lu le livre, parce que je ne suis pas un lecteur passionné des romans. En général, j’observe une règle: si la littérature comprend plus d’une page, je refuse de la lire. J’adore les chroniques et les feuilletons romains. Mais un roman entier, imprimé dans son intégralité? Non, merci! Cependant, après les nombreuses querelles de mes collègues, je l’ai finalement accepté et lu.

Je ne peux pas mentir, j’avais des difficultés à finir ce roman. C’était ennuyeux! Maupassant utilise les mêmes tropes que nous avons trouvé dans le classique de Honoré de Balzac, Illusions Perdues. Un jeune journaliste qui entre dans le journal, des personnages qui avident de pouvoir, un monde dominé par les hommes. Essayez quelque chose de nouveau! Nous avons déjà entendu cette histoire. Mais je dois admettre que ce genre d’histoire ne m’est pas étranger, parce que j’ai rencontré tellement d’hommes dans cette industrie, et ils sont les plus vils et manipulateurs que j’ai jamais rencontrés. Honnêtement, la grande majorité veut juste de l’argent, de pouvoir, et de femmes. C’est pourquoi je ne leur ferai jamais confiance. Si vous voulez perdre confiance en les hommes, entrez dans une salle de rédaction.

Je trouve donc amusant que Maupassant s’attende mieux de la part des journalistes. Qu’est-ce qu’il pensait pouvoir accomplir avec ce livre? Pensait-il que les journalistes s’asseyaient, lisaient le roman du début à la fin et décidaient soudainement: Hmm, peut-être que je ne devrais plus agir comme ça? Ou voulait-il que les lecteurs de journaux boycottent le journal, après avoir réalisé que les hommes derrière lui sont des dégénérés? Maupassant est indéniablement naïf. Ce livre ne changera pas assez les esprits des Parisiens pour transformer l’industrie du journal manipulatrice et exploiteuse.

Je suis d’accord avec mon collègue dans Le XIXe siècle sur quelques points dans son article, Question du jour. D’abord, ce serait ennuyeux si Bel-Ami était un bon homme. C’est insipide de lire sur un personnage qui suit toujours les règles et ne fait jamais rien de mal! Je suis aussi d’accord que Maupassant est un pessimiste qui ne voit pas de bien dans la société. Mon collègue écrit : «il semble avoir pris en haine la sottise, la platitude, la bassesse humaines, et cette haine l’absorbe au point de ne lui laisser voir que ce qui est soit, plat et bas.» Vous voyez, dans cette industrie, j’ai aussi rencontré des gens très créatifs, intelligents et travailleurs. Mais si on ne cherche que le mal, on ne verra jamais le bien. 

L’opinion de Maupassant sur la presse ne me surprend pas. C’est un homme mechant, arrogant, connu pour ne jamais cesser de se plaindre. Je connais des collègues qui refusent de passer plus de cinq minutes à parler avec lui en raison de sa nature extrêmement irritante. Pour cette raison, je n’ai pas l’intention de parler à M. Maupassant en face à face. Mais monsieur, si vous lisez ceci, voici mon conseil. Ayez un peu de conviction en l’humanité! Nous ne sommes pas tous si terribles, et si vous arrêtiez d’être aussi grincheux et prétentieux, peut-être que vous le verriez.

À la prochaine,

La Marquise de Mimizan

Anne Colaire : Bel-Ami : Un miroir ?

Après une suite de publications dans le feuilleton de Gil Blas, le roman Bel-Ami de M. Guy de Maupassant est apparu chez Havard il y a deux semaines, et le débat littéraire qu’il suscite dans la presse continue encore. Or, ce roman est particulièrement pertinent pour nous les journalistes, comme c’est notre monde que nous voyons reflété sur ses pages. Il est donc inévitable que nous nous regardions et que nous répondions à ce que nous voyons. Nous nous demandons donc : cette réflexion est-elle juste ?

D’autres journalistes, dont Φ du XIXe siècle, l’ont déjà noté : le portrait de la presse que propose M. de Maupassant est peint d’une vision très pessimiste. Saisi par « le désir d’arriver » (79) et motivé par la jalousie et la frustration de l’état de sa vie, jamais satisfait, son Duroy suit un chemin de ruse et de gredinerie afin de monter dans le monde de la presse. Sans remords et sans personnage vertueux pour juxtaposer celui de Duroy, M. de Maupassant ne laisse aucun espoir en l’état de la presse. Impossible de monter de la pauvreté à la haute société en travaillant honnêtement ; impossible de trouver un seul homme décent dans ce métier. Le roman nous laisse penser : y-a-t-il un moyen moral de monter cette échelle et d’arriver en haut ?

Je connais des journalistes respectables et intègres, et je connais des gens travailleurs qui se sont échappés de la pauvreté de manière honnête. Il est dommage que ce côté du journalisme  et de la société parisienne ne soit pas représenté dans Bel-Ami. Avec ce roman, M. de Maupassant risque de renforcer une attente au pire dans ce métier. Même sans condamnation directe des actions de Duroy dans le texte, il est clair à un lecteur conscient que l’auteur ne défend pas ce que ce personnage fait. Pourtant, si ce lecteur ne voit pas l’autre possibilité, il peut finir par accepter que cela définit l’état immuable du journalisme, et que nous ne pouvons rien faire pour le changer. Il y a là un danger.

Mais ce que je ne peux pas nier, c’est que cette réalité existe dans le monde de la presse, même si ce n’est pas sa totalité. Que ce personnage de Duroy soit journaliste, et que ce soit le monde du journalisme qui façonne l’homme que devient Duroy, n’est pas par hasard. D’autres critiques remettent ce fait en question : Φ doute de « la nécessité de ce choix » ; Montjoyeux du Matin déclare que « Duroy n’est pas plus un journaliste qu’il n’est un avocat, un médecin ou un ébéniste ». Je n’accepte pas cette idée. En écrivant Bel-Ami, M. de Maupassant a cherché à montrer comment le monde du journalisme peut faire d’un tel gredin un homme puissant, et les conséquences sociétales de cette transformation lorsqu’elle arrive dans ce métier en particulier. Nous voyons comment Duroy commence à influencer la politique de Paris dès qu’il devient chef des Échos pour La Vie française, « l’organe avoué du cabinet » (285) ; comment il réussit directement à changer le cabinet après avoir pris sa femme et le ministre en flagrant délit d’adultère ; comment c’est son trajectoire dans ce métier qui lui a permi de devenir « un homme d’avenir » (356) qui sera sans doute député et ministre. Ce destin pourrait-il vraiment arriver à n’importe quel médecin ou ébéniste sans les outils fournis par la presse ? Moi, j’ai des doutes. La presse est devenue aujourd’hui une des forces sociales et politiques les plus puissantes à Paris : on ne peut pas nier ce fait. Le personnage de Duroy est un avertissement nécessaire pour tout de la manipulation et le danger qui peuvent en résulter pendant cet âge de la presse.

C’est un fait frustrant, mais réel : les hommes d’aujourd’hui arrivent à monter l’échelle sociale et à influencer la politique grâce non pas à leur mérite où à leur travail honnête, mais à leurs relations, à l’argent, et à la ruse — alors que les autres souffrent. Nous ne pouvons pas ignorer que cette corruption envahit le monde de la presse. Malgré son pessimisme, ce que M. de Maupassant a réussi à faire, c’est provoquer un débat dans la presse en nous montrant un miroir qui nous force à nous regarder et à nous interroger. Voilà la chose la plus importante qui peut faire la littérature aujourd’hui.

ANNE COLAIRE.

Geneviève de Carcassonne: Réveillez-vous

Il est temps de vous réveiller et de réaliser que les hommes se servent de vous, et il est temps de les repousser. Au cours de mes voyages sur la terre, j’ai rencontré des dizaines d’hommes, tantôt voraces, tantôt aimants comme des chiots, tantôt mystérieux, assurés, timides. Je suis sortie avec des hommes riches et pauvres, communistes et monarchistes, jeunes et vieux. Mais je ne leur donne jamais ce qu’ils veulent, c’est-à-dire que je ne leur donne jamais de véritable pouvoir sur moi. Bien sûr, nous pouvons nous amuser ensemble, mais je n’abandonnerai pas le reste de ma vie pour un homme, et je ne le laisserai pas voler mon temps, mon argent et mon énergie. Ne l’oubliez pas. Mais quand je dis cela, je ne veux pas dire que nous devons aimer comme si nous étions des hommes, c’est-à-dire aimer avec avidité et avec de grandes attentes. Gardons notre empathie, notre compassion et nos charmes, quels qu’ils soient, mais souvenons-nous de ne donner, vraiment donner, que quand ils ont montré qu’ils étaient dignes de confiance. Autrement dit : lorsqu’il a sacrifié des choses pour vous, qu’il a consacré du temps et de l’énergie à vous, et qu’il a montré qu’il ne vous volerait pas.

Avez-vous déjà lu « Bel-Ami » de Guy de Maupassant ? Il m’a coupé le souffle. C’est cru, oui, et dérangeant, mais n’est-ce pas là le but ? Dans Le Gaulois, M. Quisait se plaint : « Quelle société ! Bons dieux ! Quel milieu ! Quel monde ! » Oui, quel monde, et c’est bien là le problème. Nous devons nous interroger sur le monde dans lequel nous vivons et sur la façon dont les hommes utilisent les femmes. Ils nous mâchent et nous rejettent, et le fait que Maupassant le souligne en décrivant Bel-Ami comme un serpent subtilement complice est une bonne chose. Cela montre que les écrivains s’éveillent à la ruse des hommes, et même si j’aimerais qu’un livre connaissant un tel succès soit écrit par une femme, je pense qu’il s’agit d’une histoire qui doit être racontée. M. Quisait est furieux que « Bel-Ami n’ait jamais connu ni remords, ni repentir, ni même le regret… » Il poursuit : « Il a beaucoup de talent, M. de Maupassant ; mais son Bel-Ami est bien répugnant, et, dût-on me trouver bien arriéré, j’aimerais mieux le voir choisir des sujets plus propres. » Oui, Bel-Ami est répugnant, mais Maupassant a créé un personnage qui n’est pas seulement fictif, mais qui représente les hommes de Paris et du monde d’aujourd’hui.

Nous devrions considérer le discours de Norbert de Varenne, qui dit que « vivre enfin, c’est mourir ». Nous pourrions prendre cela à notre manière : ne pas vivre une vie vide, mais s’aimer avec soin, et nourrir nos amitiés et nos amours avec douceur. Nous ne devons jamais devenir comme Clotilde, qui paie pour qu’un jeune homme libertin vive, alors qu’il séduit d’autres femmes. Aujourd’hui, je me promenais dans le parc des Buttes Chaumont et j’ai été frappée par la solidarité des femmes, la façon dont elles aident les autres quand l’une d’entre elles laisse tomber son écharpe, ou la façon dont elles s’accrochent fermement aux bras des autres, ancrées au milieu de la tempête de la ville. Même si j’aime m’amuser avec les hommes, je veux que mes lectrices se souviennent d’elles-mêmes. Rappelez-vous que tout ce dont vous avez besoin est en vous et que vous avez du pouvoir, même si vous n’en avez pas toujours l’impression. Je soutiens le récit cinglant de Maupassant sur le jeune Bel-Ami, qui pourrait être n’importe quel bel homme que nous connaissons, jeune, manipulateur et charismatique. Nous devons nous faire confiance et faire confiance à nos sœurs, et profiter du pouvoir de la curiosité, de l’aventure et de la joie de vivre sans trop nous trahir. C’est la leçon que j’ai tirée du nouveau roman, ou plutôt de la non-fiction, « Bel-Ami ».