Anne Colaire : Bel-Ami : Un miroir ?

Après une suite de publications dans le feuilleton de Gil Blas, le roman Bel-Ami de M. Guy de Maupassant est apparu chez Havard il y a deux semaines, et le débat littéraire qu’il suscite dans la presse continue encore. Or, ce roman est particulièrement pertinent pour nous les journalistes, comme c’est notre monde que nous voyons reflété sur ses pages. Il est donc inévitable que nous nous regardions et que nous répondions à ce que nous voyons. Nous nous demandons donc : cette réflexion est-elle juste ?

D’autres journalistes, dont Φ du XIXe siècle, l’ont déjà noté : le portrait de la presse que propose M. de Maupassant est peint d’une vision très pessimiste. Saisi par « le désir d’arriver » (79) et motivé par la jalousie et la frustration de l’état de sa vie, jamais satisfait, son Duroy suit un chemin de ruse et de gredinerie afin de monter dans le monde de la presse. Sans remords et sans personnage vertueux pour juxtaposer celui de Duroy, M. de Maupassant ne laisse aucun espoir en l’état de la presse. Impossible de monter de la pauvreté à la haute société en travaillant honnêtement ; impossible de trouver un seul homme décent dans ce métier. Le roman nous laisse penser : y-a-t-il un moyen moral de monter cette échelle et d’arriver en haut ?

Je connais des journalistes respectables et intègres, et je connais des gens travailleurs qui se sont échappés de la pauvreté de manière honnête. Il est dommage que ce côté du journalisme  et de la société parisienne ne soit pas représenté dans Bel-Ami. Avec ce roman, M. de Maupassant risque de renforcer une attente au pire dans ce métier. Même sans condamnation directe des actions de Duroy dans le texte, il est clair à un lecteur conscient que l’auteur ne défend pas ce que ce personnage fait. Pourtant, si ce lecteur ne voit pas l’autre possibilité, il peut finir par accepter que cela définit l’état immuable du journalisme, et que nous ne pouvons rien faire pour le changer. Il y a là un danger.

Mais ce que je ne peux pas nier, c’est que cette réalité existe dans le monde de la presse, même si ce n’est pas sa totalité. Que ce personnage de Duroy soit journaliste, et que ce soit le monde du journalisme qui façonne l’homme que devient Duroy, n’est pas par hasard. D’autres critiques remettent ce fait en question : Φ doute de « la nécessité de ce choix » ; Montjoyeux du Matin déclare que « Duroy n’est pas plus un journaliste qu’il n’est un avocat, un médecin ou un ébéniste ». Je n’accepte pas cette idée. En écrivant Bel-Ami, M. de Maupassant a cherché à montrer comment le monde du journalisme peut faire d’un tel gredin un homme puissant, et les conséquences sociétales de cette transformation lorsqu’elle arrive dans ce métier en particulier. Nous voyons comment Duroy commence à influencer la politique de Paris dès qu’il devient chef des Échos pour La Vie française, « l’organe avoué du cabinet » (285) ; comment il réussit directement à changer le cabinet après avoir pris sa femme et le ministre en flagrant délit d’adultère ; comment c’est son trajectoire dans ce métier qui lui a permi de devenir « un homme d’avenir » (356) qui sera sans doute député et ministre. Ce destin pourrait-il vraiment arriver à n’importe quel médecin ou ébéniste sans les outils fournis par la presse ? Moi, j’ai des doutes. La presse est devenue aujourd’hui une des forces sociales et politiques les plus puissantes à Paris : on ne peut pas nier ce fait. Le personnage de Duroy est un avertissement nécessaire pour tout de la manipulation et le danger qui peuvent en résulter pendant cet âge de la presse.

C’est un fait frustrant, mais réel : les hommes d’aujourd’hui arrivent à monter l’échelle sociale et à influencer la politique grâce non pas à leur mérite où à leur travail honnête, mais à leurs relations, à l’argent, et à la ruse — alors que les autres souffrent. Nous ne pouvons pas ignorer que cette corruption envahit le monde de la presse. Malgré son pessimisme, ce que M. de Maupassant a réussi à faire, c’est provoquer un débat dans la presse en nous montrant un miroir qui nous force à nous regarder et à nous interroger. Voilà la chose la plus importante qui peut faire la littérature aujourd’hui.

ANNE COLAIRE.

Geneviève de Carcassonne: Réveillez-vous

Il est temps de vous réveiller et de réaliser que les hommes se servent de vous, et il est temps de les repousser. Au cours de mes voyages sur la terre, j’ai rencontré des dizaines d’hommes, tantôt voraces, tantôt aimants comme des chiots, tantôt mystérieux, assurés, timides. Je suis sortie avec des hommes riches et pauvres, communistes et monarchistes, jeunes et vieux. Mais je ne leur donne jamais ce qu’ils veulent, c’est-à-dire que je ne leur donne jamais de véritable pouvoir sur moi. Bien sûr, nous pouvons nous amuser ensemble, mais je n’abandonnerai pas le reste de ma vie pour un homme, et je ne le laisserai pas voler mon temps, mon argent et mon énergie. Ne l’oubliez pas. Mais quand je dis cela, je ne veux pas dire que nous devons aimer comme si nous étions des hommes, c’est-à-dire aimer avec avidité et avec de grandes attentes. Gardons notre empathie, notre compassion et nos charmes, quels qu’ils soient, mais souvenons-nous de ne donner, vraiment donner, que quand ils ont montré qu’ils étaient dignes de confiance. Autrement dit : lorsqu’il a sacrifié des choses pour vous, qu’il a consacré du temps et de l’énergie à vous, et qu’il a montré qu’il ne vous volerait pas.

Avez-vous déjà lu « Bel-Ami » de Guy de Maupassant ? Il m’a coupé le souffle. C’est cru, oui, et dérangeant, mais n’est-ce pas là le but ? Dans Le Gaulois, M. Quisait se plaint : « Quelle société ! Bons dieux ! Quel milieu ! Quel monde ! » Oui, quel monde, et c’est bien là le problème. Nous devons nous interroger sur le monde dans lequel nous vivons et sur la façon dont les hommes utilisent les femmes. Ils nous mâchent et nous rejettent, et le fait que Maupassant le souligne en décrivant Bel-Ami comme un serpent subtilement complice est une bonne chose. Cela montre que les écrivains s’éveillent à la ruse des hommes, et même si j’aimerais qu’un livre connaissant un tel succès soit écrit par une femme, je pense qu’il s’agit d’une histoire qui doit être racontée. M. Quisait est furieux que « Bel-Ami n’ait jamais connu ni remords, ni repentir, ni même le regret… » Il poursuit : « Il a beaucoup de talent, M. de Maupassant ; mais son Bel-Ami est bien répugnant, et, dût-on me trouver bien arriéré, j’aimerais mieux le voir choisir des sujets plus propres. » Oui, Bel-Ami est répugnant, mais Maupassant a créé un personnage qui n’est pas seulement fictif, mais qui représente les hommes de Paris et du monde d’aujourd’hui.

Nous devrions considérer le discours de Norbert de Varenne, qui dit que « vivre enfin, c’est mourir ». Nous pourrions prendre cela à notre manière : ne pas vivre une vie vide, mais s’aimer avec soin, et nourrir nos amitiés et nos amours avec douceur. Nous ne devons jamais devenir comme Clotilde, qui paie pour qu’un jeune homme libertin vive, alors qu’il séduit d’autres femmes. Aujourd’hui, je me promenais dans le parc des Buttes Chaumont et j’ai été frappée par la solidarité des femmes, la façon dont elles aident les autres quand l’une d’entre elles laisse tomber son écharpe, ou la façon dont elles s’accrochent fermement aux bras des autres, ancrées au milieu de la tempête de la ville. Même si j’aime m’amuser avec les hommes, je veux que mes lectrices se souviennent d’elles-mêmes. Rappelez-vous que tout ce dont vous avez besoin est en vous et que vous avez du pouvoir, même si vous n’en avez pas toujours l’impression. Je soutiens le récit cinglant de Maupassant sur le jeune Bel-Ami, qui pourrait être n’importe quel bel homme que nous connaissons, jeune, manipulateur et charismatique. Nous devons nous faire confiance et faire confiance à nos sœurs, et profiter du pouvoir de la curiosité, de l’aventure et de la joie de vivre sans trop nous trahir. C’est la leçon que j’ai tirée du nouveau roman, ou plutôt de la non-fiction, « Bel-Ami ».

Anaïs d’Avignon: La perspective feministe de Bel-Ami

Récemment, tout que j’ai entendu, c’est l’avis de tout le monde sur Bel-Ami, le nouveau roman de Guy Maupassant. Alors, la semaine dernière, je suis allé à la librairie. J’ai combattu d’autres personnes pour prendre le livre. Tout le monde veut le lire! Et qui peut dire non? Chaque journal donne son avis. Et la plupart le détestent comme si c’était le pire roman du monde. Le Gaulois dit même que Maupassant a écrit un roman sans “un atome de conscience morale”! Il faut que je l’ai lu!  

Et, je suis très heureuse d’avoir fait ça. Ce roman a ouvert mes yeux à un problème que j’ai pas discuté avec vous, les lecteurs. Mais, avant de parler de ça, je veux m’occuper de l’idée, qui est présentée par beaucoup de journalistes, que le roman est trop pessimiste. À cela, je dis: est-ce qu’il n’a pas le droit de dire qu’il veut? Il ne peut illustrer le monde qu’il voit? Le problème aujourd’hui, à mon avis, est que tout le monde veut lire ce qu’il sait être moralement correct. Ils sont terrifiés à l’idée de devoir rendre leurs conclusions indépendantes. C’est comme les critiques de Flaubert- pourquoi est-ce qu’on besoin d’un narrateur qui condamne les actions des personnages? Sont tous les lecteurs des enfants? Non! Nous savons quand quelque chose est immoral. 

Mais, plus important, je pense que ce roman a ouvert les yeux de la société des rôles de genre. Je sais que c’est surprenant. Quand j’ai fini le livre, mes amis ont supposé que je le détestais à cause de la façon dont il montre les femmes. Mais, ma réaction a été à l’opposé! Oui, dans le roman, DuRoy utilise les femmes pour améliorer sa carrière, et elles n’ont pas de personnalité complexe. Mais, comme j’ai dit, je peux me faire mon opinion. Et, je pense que le roman présente l’oppression des femmes à travers le regard de DuRoy. Non, le narrateur ne condamne pas les actions de DuRoy avec les femmes, mais quel bon roman fait cela? Il montre la façon dont les femmes, malgré le fait que c’est difficile d’être employée, sont utilisées pour monter. DuRoy séduit les femmes qui peuvent s’aider, et utiliser ses ressources pour monter et réussir sa carrière. Le roman, à mon avis, est utilisé pour exposer le misogyny, pas juste dans la journaliste, mais dans le monde. Il faut que les romans comme Bel-Ami existent! Beaucoup de gens veulent agir comme si la vie des femmes était égale à celle des hommes et que le problème des femmes n’existait pas. Et il est très facile de prétendre cela quand l’idée n’est pas exposée dans les médias populaires. Mais quand quelqu’un comme Maupassant expose ce phénomène à travers de la littérature, les hommes sont obligés de réfléchir à leurs actions. Je ne pense pas que c’est le butte de Maupassant du tout! Il n’est pas une feministe! Mais, quand tout le monde pense “Quel méchant!” à DuRoy, peut- être que les hommes sont obligés de réfléchir à la façon dont ils utilisent les femmes dans leur vie. 

Mais, j’ai aussi des problèmes avec des romans. Comme j’ai dit, les femmes du roman n’ont pas de personnalité complexe. Elles sont des objets pour la montée de DuRoy. Ils ne sont pas non plus présentés comme de bonnes personnes, bien que la plupart des personnages du roman ne le soient pas! Je pense que si les femmes avaient été présentées commes les personnages intéressants, plus de lecteurs avaient eu de l’empathie pour leur lutte.

En conclusion, j’ai aimée le roman, et je pense que la réaction negatif est stupide. Aux critiques négatives, je vous demande: Quel est le problème? Que l’auteur a donné ses idées sur la page? Si on voit un roman comme un commentaire sur la société, et pas comme la bible, on peut l’analyser plus. Je pense que ce roman était une exposition sur la lutte des femmes (même si elles ne sont pas trop sympathiques!). Je ne crois pas que c’est le but de Maupassant, mais c’est mon interprétation! Je vous encourage à avoir une vision indépendante sur la littérature, et à l’utiliser pour lutter pour les droits des femmes! 

Sincerement, 

Anaïs d’Avignon

Les critiques de Bel-Ami

Les critiques négatives

  • La moralité: Les comparaisons à Flaubert
  • Gagner dans la vie à cause d’actions immorales
  • Le pessimisme

La moralité: La comparisons à Flaubert

“[Bel-Ami est considéré] le roman-type d’une école nouvelle, qui se réclame de G. Flaubert, bien que ses adeptes diffèrent fortement de ce maître.” (Henry Fouquier, Le XIX siècle)

“D’ailleurs M. de Maupassant procède moins de Zola que de Flaubert. Il a la description sobre, sans empâtement, sans fouillis, la narration rapide et alerte, le style net, ferme et bien français. Pas plus que Flaubert il ne brouille les limites de la littérature et des arts plastiques, ni ne cherche à remplacer les idées par les sensations. Mais, comme Flaubert, il semble avoir pris en haine la sottise, la platitude, la bassesse humaines, et cette haine l’absorbe au point de ne lui laisser voir que ce qui est sot, plat et bas.” (Φ [Phi], Le XIXe siècle)

“A l’exemple de Flaubert, M. Guy de Maupassant, qui a tant de conscience littéraire, se refuse absolument à avoir, ne fût-ce qu’un atome de conscience morale.” (Le Gaulois)

Qui est Flaubert? Dans le roman de Flaubert, Madame Bovary est immorale avec l’argent et l’amour. Flaubert a été poursuivi par la justice pour avoir publié ce roman parce que la narration ne condamne pas ces actions (procès d’ « outrage à la morale publique et religieuse et aux bonnes mœurs »).

(Il y a plus d’information de Madame Bovary ici)

Est-ce que vous pensez qu’un roman devrait condamner les actions immorales des personnages?

Gagner dans la vie à cause d’actions immorales

“Autrefois, sur la scène et dans les romans, on opposait volontiers honneur à l’argent, la pauvreté honnête a la richesse tarée, on abusait même de la joute et du parallèle.” (Le Gaulois)

Cet article dit que le livre de Maupassant se distingue des autres de l’époque car il ne fait pas de lien entre la richesse et l’honneur. Le livre ne dit pas que si vous êtes honnête, vous gagnerez dans la vie. Duroy devient riche à cause des actions immorales. Il est pauvre et malhonnête, et sa malhonnêteté finit par triompher.

Est-ce que vous pensez que cette dichotomie existe encore dans la littérature? (La richesse tarée par opposition à la pauvreté honnête?)

Le pessimisme

“Seulement les milliers de Français qui liront l’œuvre de M. de Maupassant, sans faire la part du tempérament de l’écrivain et de son système, concevront une assez triste idée des journalistes du temps présent, ce qui ne laisse pas d’être un peu agaçant pour les gens qui ont l’honneur d’exercer ce métier…” (Φ [Phi], Le XIXe siècle)

Cette école, qu’on a appelée si mal naturaliste, devrait s’appeler l’école pessimiste. Car ce qui me paraît son dogme essentiel, c’est de faire du pessimisme un élément d’art.” (Henry Fouquier, Le XIX siècle)

“Encore, faut-il rayer ce mot de caractère: car Bel-Ami n’en pas. Il est absolument passif.”  (Henry Fouquier, Le XIXe siècle)

“Ce Duroy est un alphonse et un proxénète d’une simplicité absolue.” (Henry Fouquier, Le XIXe siècle)

Est-ce que vous pensez que Bel-Ami est “passif”? Pensez-vous qu’il y a plusieurs façons d’interpréter cela?

La réponse de Maupassant

  • La généralisation
  • Le vice triomphe à la fin
  • La presse comme une République
  • La réalité du roman Bel-Ami

Maupassant a envoyé une réponse aux critiques à Gil Bas. Plus précisément, il défend son livre en affirmant qu’une grande partie de celui-ci est vrai. Il dit également qu’il n’essaie pas de généraliser sur le journalisme.

“Or, comment a-t-on pu supposer une seconde que j’aie eu la pensée de synthétiser tous les journaux de Paris en un seul?”

“Alors, de quoi se plaint-on? De ce que le vice triomphe à la fin? Cela n’arrive-t-il jamais…?”

“La Presse est une sorte d’immense République qui s’étend de tous les côtés, ou on trouve de tout, ou on peut tout faire; ou il est aussi facile d’être un homme fort honnête homme que d’être un fripon.”

“Donc, un homme, entrant dans le journalisme, pouvait employer facilement les moyens spéciaux qu’il devait prendre pour parvenir.”

Est-ce que vous pensez que, quelquefois, la vice triomphe à la fin?

Les critiques positives


“Un livre comme le sien se défend de lui-même contre les comiques indignations des Bel-Ami du journalisme, et les lourdes criailleries des pontifes.” (Octave Mirbeau, La France)

Qu’est-ce que vous pensez qu’il veut dire par cela?

“Voila, je suis friand; et, voyez-vous, elles ont, venant de son jardin, une saveur et une suc tentateurs auxquels je ne résiste pas. Ne résistez pas non plus, croyez-m’en. Et ne vous effrayer pas de ce que la vérité saisie sur le vif par une observation implacable et quelque peu repulsive. “ (La Revue politique et littéraire, 23 mai 1885)

Atelier V: Josie et Hannah

Le journal: Le Figaro. Titre de la rubrique: Échos de Paris – La Politique. Le pseudonyme qui signe: F.M.

Un autre pseudonyme: le masque de fer.

Nos impressions: on parle beaucoup de gens de politique (la ministre de la justice, l’académie française, l’ambassadeur). Aussi on parle des mariages, mais toujours entre les gens ‘importants’ ou célèbre (un prince par exemple). On parle d’une grève, les prix — les personnes qui gagnent les prix.