Fantine D’Avignon: Les Femmes en Bel-Ami

Mes très chers lecteurs,

   C’est un autre jour ici à Paris. Comme vous et moi connaissons très bien le comportement des revues parisiennes, nous savons qu’à chaque nouveau jour, vient une nouvelle édition de nombreuses revues remplies de chroniqueurs qui semblent tous sentir qu’ils doivent partager leurs réflexions sur les nouveautés littéraires, les derniers événements, le travail de leurs pairs, etc. En règle générale, j’évite de participer à cette saison de potins inutile et frénétique et choisis plutôt de m’insérer lorsque cela est nécessaire pour partager une perspective qui n’est pas représentée dans cette vague de chroniqueurs inflexibles et vexants.

Mes très chers lecteurs, aujourd’hui est l’un de ces jours. Je m’insère dans une conversation qui manque, non pas de contenu ou de quantité, mais plutôt de perspective et de valeurs. Guy de Maupassant a sorti son roman Bel-Ami et, comme prévu, il a reçu beaucoup d’attention dans la presse.

Le roman, comme je suppose que vous l’avez tous lu ou lu, est très controversé. Je suis quelque peu d’accord avec beaucoup de mes collègues chroniqueurs dans leur critique générale selon laquelle le roman est pessimiste et peut-être même irréaliste. Mes collègues chroniqueurs contestent la représentation de la presse et ses intentions, ses objectifs. Oui, je pense que ce roman n’est pas l’interprétation la plus réaliste de la presse et je le trouve pessimiste. Cependant, je souhaite évoquer une pensée qui n’a été que légèrement discutée par mes pairs. Certains suggèrent que Maupassant écrit à partir de ses expériences et de son point de vue. Je tiens à souligner que cela pourrait être tout à fait vrai. Maupassant écrit selon sa perspective, celle d’un homme riche et puissant, qui n’a pas eu à gravir les échelons sociaux ni à lutter dans la société parisienne. Ainsi, un roman mettant en scène le point de vue d’un individu très privilégié sera naturellement irréaliste. Sa perspective est tout simplement irréaliste, surtout en ce qui concerne l’homme et la femme parisiens de tous les jours.

Ceci mis à part, je suis plutôt en désaccord avec un élément important du roman : la façon dont DuRoy a gravi les échelons du journalisme. Le seul moyen pour DuRoy de se déplacer dans la sphère journalistique passe par les femmes. La représentation et l’utilisation des femmes par Maupassant sont néfastes et sexistes. Dans ce roman, les femmes ne sont pas des personnes, elles sont utilisées comme de simples objets à utiliser ou à utiliser pour gravir les échelons sociaux et accéder au pouvoir. Le double standard que Maupassant présente pour les femmes et son personnage DuRoy est stupéfiant. Tout ce que DuRoy représente est hypocrite.

Bon nombre des critiques de mes collègues ne parlent pas des femmes. Ils choisissent plutôt de se concentrer sur la représentation générale du journalisme. La seule exception concerne Mirbeau dans La Presse et Bel-Ami, dans le journal La France. Il commence sa critique en disant“Le sujet de Bel-Ami est fort simple. C’est l’histoire d’un gredin qui vit des femmes. Or, il arrive ce gredin qui vit des femmes est en meme temps un journaliste.” Cependant, cela s’arrête là aussi. Il ne développe pas sa déclaration très vraie. Il avance très vite.

La réponse de Maupassant n’aide pas son cas. Sa réponse prouve plutôt sa vision d’une élite riche dans notre société.  Dans sa réponse, il continue de parler des femmes comme de tremplins et non comme des personnes. Il hésite à admettre l’intelligence des femmes et il est très peu mentionné dans cette histoire comment les actions de DuRoy affectent les femmes. Cependant, son roman dresse un tableau néfaste – si une femme est intelligente, alors elle a de mauvaises intentions et se jettera sur les hommes. 

Toute femme sait que ce n’est pas le cas. Il est évident que notre intelligence, en tant que femmes, n’est pas appréciée. Il est évident que nous, en tant que femmes, ne sommes ni appréciées ni considérées comme des personnes dans notre société. Nous sommes bien plus que nos maris, nos enfants, notre statut et nos familles. Bel-Ami ne raconte pas une histoire précise des Parisiennes. Il dépeint plutôt l’histoire d’un scélérat hypocrite, sans morale ni valeurs, sans empathie ni remords. Il raconte l’histoire de quelqu’un qui voit le monde à travers ces yeux. Si seulement un homme ayant les moyens et le statut de Maupassant était assez intelligent pour le reconnaître.