Pour mon projet, j’ai voulu explorer l’histoire de la cuisine franco-canadienne et américaine en m’appuyant sur les premiers livres de cuisine des pionniers pour mieux comprendre comment les traditions culinaires ont évolué en Amérique du Nord. Au cours de mes recherches, j’ai découvert La Cuisinière Canadienne de 1840 (Bibliothèque et Archives Canada), considéré comme le premier livre de cuisine canadien-français. Avant sa publication, la transmission des savoirs culinaires se faisait principalement à l’oral ou à travers des textes importés de France, rendent cet ouvrage particulièrement précieux pour comprendre la vie quotidienne au XIXe siècle pour les premiers canadiens français. J’ai découvert une cuisine simple qui est le reflet de techniques françaises importées, d’ingrédients locaux et internationaux, et d’une survivance culturelle.
Ce qui rend La Cuisinière Canadienne si fascinante, c’est qu’elle reflète à la fois les contraintes et la créativité de la cuisine coloniale. Le livre témoigne de la disponibilité des ingrédients à l’époque, influencée par les échanges commerciaux et les interactions culturelles entre la France, la Grande-Bretagne et le Portugal. On retrouve ainsi des recettes comme le gâteau du Portugal, des muffins britanniques, et des scones sont intégrés à la gastronomie locale. Malgré ces influences, l’ouvrage reste profondément ancré dans les techniques françaises, mettant en avant des savoir-faire classiques comme le travail de la gélatine, la farce, et la préparation des pâtisseries. En Amérique du Nord, les Français ont apporté des techniques en pain, en pâtisserie et en pâte. Par exemple, nous avons la crêpe, le pâté brisee, le pâté feuilleté, les beignets…
Le Pâte Brisée
Inspirée par mes recherches, j’ai eu envie de quelque chose de sucré, un dessert résolument français, mais aussi facile à réaliser à la maison. Une tarte à base de pâte brisée m’a semblé être le choix idéal. Je n’avais pas fait de vraie pâte depuis mon retour aux États-Unis, à part une pâte à pizza, et j’ai redécouvert à quel point une bonne tarte pouvait être délicieuse. Cette recette, qui s’appuie sur la tradition de la pâtisserie française tout en mettant en valeur un ingrédient emblématique d’Amérique du Nord: les bleuets, est la parfaite fusion entre histoire et manger quelque chose de délicieux.

La recette de pâte brisée était simple et plutôt moyenne. Mon premier défi a été de convertir chaque quantité de farine, de beurre et de lait en mesures modernes. J’ai fait appel à mes connaissances et j’ai choisi de mesurer proportionnellement, en ajustant les quantités par essais et erreurs. J’ai fini par ajouter une demi-tasse de beurre fondu à une demi-tasse de lait, puis j’ai mélangé le tout avec une tasse de farine et une pincée de sel. La pâte était un peu trop molle, alors j’ai rajouté un peu de farine. Je l’ai ensuite laissée reposer au réfrigérateur pendant une heure pour qu’elle prenne bien.

Une fois sortie du réfrigérateur, j’ai étalé la pâte, beurré mon moule, puis placé la pâte à l’intérieur en repliant les bords pour former une sorte de tarte. Pendant que le four préchauffait à 375°F, j’ai remis le moule au réfrigérateur pour qu’il refroidisse à nouveau. On dit qu’une pâte plus froide avant d’entrer au four devient plus croustillante.






J’ai fait cuire la croûte pendant environ 15 minutes, avant de placer les baies sur le dessus.
Les Baies
J’ai trouvé ma recette de garniture dans un livre de cuisine patrimonial consacré aux recettes à base de bleuets, intitulé Recettes aux bleuets (BANQ). Ce livre met en avant l’importance de ce petit fruit dans la cuisine québécoise et révèle une distinction intéressante: selon l’ouvrage, les bleuets sont un fruit indigène du Canada, différent des blueberries que l’on trouve aux États-Unis.
Au Québec, les bleuets sont profondément ancrés dans le patrimoine culinaire et culturel. Leur récolte, qui a lieu au cœur de l’été, marque une période charnière de la saison et s’accompagne souvent de traditions et de souvenirs familiaux (rappel de Maria Chapdelaine). Cette connexion entre le fruit et l’identité québécoise en fait un ingrédient incontournable des desserts traditionnels, des tartes aux confitures, en passant par les poudings, et les muffins. En choisissant cette recette, j’avais envie de rendre hommage à cette tradition tout en l’intégrant à ma propre expérience culinaire.
La cueillette était un moyen de survie. Les myrtilles symbolisaient les joies de l’été et de l’automne, lorsque la nourriture de la forêt était abondante et que les difficultés de l’hiver faisaient place à la douceur d’une bonne récolte. Au cours d’une année difficile, lorsque les animaux étaient morts et que les plantations refusaient de pousser, les premiers habitants pouvaient compter sur une solide récolte d’aliments sauvages. Les baies étaient transformées en confitures, glacées, incorporées dans des pâtisseries festives, ou dégustées seules.
Àpres la recette, j’ai mélangé les bleuets avec de la farine, du sucre, du beurre, du jus de citron, et une pincée de sel. La recette originale demandait de la chapelure, mais comme je n’en avais pas sous la main, je l’ai simplement omise.
Une fois ma croûte à moitié cuite, j’y ai disposé la garniture et ajouté quelques décorations sur le dessus. J’ai ensuite enfourné la tarte à 360° F pendant encore 35 minutes, jusqu’à ce que les décorations soient bien dorées et croustillantes et que la garniture bouillonne, débordant légèrement sur les bords.

Dès la sortie du four, je n’ai pas pu résister. J’ai plongé ma cuillère dans la tarte encore brûlante. C’était tellement, tellement bon! Bien que le résultat final soit un peu désordonné, c’est l’excès de baies qui le rend si délicieux!

Mes sources
https://www.canadiana.ca/view/oocihm.95419/113
https://www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_1966_num_21_5_421452
https://numerique.banq.qc.ca/patrimoine/details/52327/4199676?docref=AA7tbpkMyy3Ce6GIEkOfbQ
